top of page

LA BIOMINÉRALISATION

La biominéralisation correspond à un processus extracellulaire conduisant à la formation d’un squelette par la précipitation de carbonate de calcium⁽¹⁾ cristallisant en aragonite. Elle permet donc la création de matière minérale par un organisme vivant. Il existe deux types de biominéralisation, mais celle qui nous intéresse est ici la biominéralisation contrôlée biologiquement, celle induite par les coraux.

Nous tenons tout d’abord à vous informer que l’ensemble des procédés impliqués dans la biominéralisation demeurent encore méconnus par les scientifiques, nous tâcherons alors de réaliser une synthèse globale de ce qui est confirmé et des hypothèses essentielles.

Squelette corail.jpg

Le lieu de calcification des coraux

 

Les tissus responsables de la calcification sont appelés : épithélium⁽²⁾ calico-blastique ou aussi connu sous le nom de calicoderme. Les cellules qui le composent sont formées lors de la fixation et le développement des coraux. Ce tissu est composé d’une couche de cellules Desmocytes et de cellules Calicoblastes, qui ont des fonctions différentes. Les Calicoblastes sont des cellules de formes variables, plus épaisses en cas d’une activité efficace, et permettent la calcification notamment avec la production d’une Matrice Organique (MO). Les Desmocytes permettent l’ancrage des tissus au squelette grâce à de nombreux hemi-desmosomes⁽³⁾ qui se lient aux protéines de la MO. Malheureusement, la composition de cette MO étant encore obscure, nous ne connaissons pas la protéine exacte qui lie les intégrines des hémi-desmosomes au reste de la MO. Dans cette couche tissulaire spécifique, il n’y a pas de zooxanthelle.

Carbonate Calcium
épithélium
BIOMIN2RALISATION KATAMARAN.png

Calicoblaste

Corail tissus coupe.gif

Espace subcalicoplastique

Un espace d’épaisseur variable perdure entre l’épithélium calicoblastique et le squelette : l’espace subcalicoplastique. Ce milieu extracellulaire est primordial car il est l’espace où s’effectue la calcification.


Nous faisons alors face à un problème, nous ne pouvons pas déterminer si le Milieu Calcifiant Extracellulaire (MCE) est un compartiment fermé ou ouvert. Des jonctions serrées ont pu être trouvées chez les coraux, néanmoins de nombreuses expériences démontreraient qu’il existe une certaine perméabilité au niveau de l’épithélial. Des conclusions sur le type de jonctions cellulaires au sein des coraux ne peuvent pas alors être établies.

La nature des liaisons des cellules entre-elles demeurent partiellement méconnue, cependant deux types de jonctions sont envisageables :

  • les jonctions serrées : du côté apical des cellules, elles permettraient l’étanchéité et seraient à l’origine des barrières épithéliales. La présence de ces jonctions impliquerait un transport du matériel de la calcification par voie transcellulaire, c’est à dire à l’intérieur des cellules. Des protéines membranaires de transport⁽⁴⁾, type pompe ou canal, sont alors indispensables.

  • Les jonctions communicantes : elles permettent le partage du cytoplasme de deux cellules adjacentes. Les jonctions communicantes des différentes s’associent entre-elles pour former un canal de connexion. Étant des jonctions moins serrées que les précédentes, elles sont donc moins étanches. Une partie transport pourrait alors s’effectuer par voie paracellulaire, autrement dit entre les cellules. Étant des jonctions moins serrées que les précédentes, elles sont donc moins étanches. Une partie transport pourrait alors s’effectuer par voie paracellulaire, autrement dit entre les cellules. Elles permettraient de sélectionner indirectemment les molécules.

Protéines membranaires

Nous faisons alors face à un problème, nous ne pouvons pas déterminer si le Milieu Calcifiant Extracellulaire (MCE) est un compartiment fermé ou ouvert. Des jonctions serrées ont pu être trouvées chez les coraux, néanmoins de nombreuses expériences démontreraient qu’il existe une certaine perméabilité au niveau de l’épithélial. Des conclusions sur le type de jonctions cellulaires au sein des coraux ne peuvent pas alors être établies.

 

Les donnés de concentration ionique et de pH du site de calcification sont primordiaux pour comprendre les mécanismes de la biominéralisation.

Un pH plutôt basique aux alentours de 8-9 a été déterminé dans le MCE. Il est supérieur à celui des tissus, possédant un pH qui tourne autour de 7 à 8. La concentration  en Ca²⁺ dans ce milieu est également différente de celle de l'eau de mer, elle lui est supérieure. Ces écarts de concentrations impliquent forcément des mécanismes de transports actifs, et donc une consommation d’énergie. Toutefois, ces résultats sont à considérer avec du recul car les méthodes expérimentales employées afin de les obtenir ne remplissent pas toujours des conditions optimales et nécessitent même parfois une dégradation des cellules.

Nous pouvons tout de même noter que quelques expériences témoignent d’une sursaturation de l’aragonite dans le MCE, au niveau du site de calcification, d’un minimum de 7 fois supérieur à celui de l’eau de mer. Par conséquent, la composition du MCE serait contrôlé par le corail et isolé du milieu extérieur par une perméabilité faible de l’épithélium. Enfin, des données sur les concentrations en CO2 / HCO3⁻ / CO3⁻  sont inexistantes.

Les éléments essentiels à la biominéralisation

 

Nous le rappelons, le squelette corallien est composé de lipides, protéines. Il est surtout caractérisé par la présence de cristaux d’aragonite issus de la précipitation du carbonate de calcium selon un phénomène appelé la calcification⁽⁵⁾. La réaction générale de calcification peut être représentée selon cette équation bilan :

 

Ca²⁺ + CO3²⁻ => CaCO3

Le Carbonate de Calcium nécessite alors lui-même un apport de Calcium et de Carbone inorganique. Le Calcium est prélevé sous la forme de l’ion Ca²⁺ du milieu extérieur. Il s’agit du cinquième  élément le plus abondant dans la croûte terrestre. Par l’érosion et divers processus de transport, il est aussi très présent dans les océans.  Ainsi, il est aisé pour le polype d’y avoir accès.

 

 En ce qui concerne le Carbonate, plusieurs origines peuvent être envisagées avec comme principales :

  • Le HCO3⁻ issu du milieu extérieur comme pour le Ca²⁺. Il est présent grâce à la dissolution du CO2 et des différentes réactions dans lesquelles il est impliqué au sein des océans.

  • Le CO2 produit par la respiration des organismes, notamment celle effectuée par les polypes.

 

 Chez les polypes, deux réactions sont alors envisageables selon la source de Carbone inorganique :

 

Ca²⁺ + HCO3- => CaCO3 + H⁺   ou   Ca²⁺ + CO2 + H20 => CaCO3 + 2H⁺

Certains indices indiqueraient que le HCO3- serait plutôt la source de C inorganique pour la calcification.

 

Par ailleurs, il peut être intéressant de noter que dans tous les cas, des ions H⁺ résultent de la calcification. Ils doivent alors être rejetés du site de calcification pour maintenir des conditions de pH optimales. En effet, si la concentration en H⁺ est trop importante, les réactions de calcification qui viennent d’être énoncées vont être modifiées. Le sens des réactions vont alors s’effectuer vers la gauche, dans le sens inverse. Cela signifie que nous avons une perte de production de CaCO3. Ainsi, si les coraux n’ont pas suffisament de CaCO3, ils ne pourront pas produire efficacement leur squelette calcaire, ils ne pourront donc pas croître convenablement.

800px-Aragonite_2_Enguidanos.jpg
CaC03.png
Calcification

La Matrice Organique, élément essentiel de la Biominéralisation

 

Une Matrice est sécrétée uniquement dans les vésicules⁽⁶⁾ des calicoblastes puis libérée par exocytose⁽⁷⁾ par voie constitutive dans le MCE : la Matrice Organique (MO). Il est admis qu’elle constitue un élément important puisqu’elle contrôle la composition du squelette corallien, sa structure et donc plus généralement la calcification. Les cristaux se mélangent avec elle. Elle assure une certaine protection face aux agressions extérieures.

 

Les mesures du taux de la MO dans le squelette corallien sont assez fluctuantes. Une marge d’erreur est donc possible. Les valeurs les plus précises qui ont été obtenues dernièrement l’estiment à 1 % dans le squelette en état déshydraté et 2,5 % en état hydraté.

 

 La MO se compose d’un mélange de plusieurs macromolécules, dans laquelle ont été estimés:

  • de la chitine.

  • un ensemble de sucres simples et plus complexes telle que des substances semblables  à des acides hyaluroniques – polysaccharides – Il existe aussi une possibilité d’autres sucres simples assemblés en glycosaminoglycane⁽⁸⁾.

  • Des lipides.

  • De nombreuses protéines. Elles contiennent une grande richesse dans leur composition en acides aminés. Ces protéines peuvent être sulfatées ou glycosylées. Elles sont néanmoins nombreuses à découvrir, la seule connue parfaitement de nos jours est une protéine appelée galaxine.

  • Une présence également d’eau.

  • Une enzyme découverte ; l’anhydrase carbonique. Elle permet de transformer le CO2 en CO3-, autrement dit elle permet d’obtenir le carbone inorganique dans sa forme utile à la calcification.

 

Le ratio entre les sucres et les protéines est variable selon les différentes espèces de coraux. Il en va de même avec la présence de certaines des molécules énoncées.

 

Sa composition va alors former une sorte d’hydrogel avec des acides aminés qui permettent une fixation importante d’une quantité de Ca²⁺. En revanche, il y a une faible affinité entre les composés, les liaisons formées sont réversibles. Alors pourquoi avoir une MO ? Elle permettrait de concentrer les ions Ca²⁺ avant de les relâcher aux moment opportuns de la calcification. Ensuite, les phospholipides de la MO fixent à leur tour le calcium : ils serviraient ensuite de base de la cristallisation du CaCO3 qui conduirait à la formation de la fibre squelettique.

 

La MO pourrait cumuler plusieurs effets dans la biominéralisation. Tout d’abord, elle pourrait agir comme un facteur limitant de la calcification. La vitesse de production et de sécrétion de MO dictant la vitesse de calcification, elle permet de contrôler la croissance en général. Ensuite, dans la répartition de la MO, elle va pouvoir former un moule qui a un effet inhibiteur en cas de précipitation trop importante du carbonate de calcium.

V & E
Glycosaimopoidjezfe

Le transport des éléments essentiels à la calcification

Il existe quatre principales hypothèses pour l’apport des ions au site de calcification :

1. Par voie paracellulaire de l’ectoderme calicoblastique de façon passive. La diffusion s’effectuerait par un gradient de concentration.

 

Hypothèse_1.png
Hypothèse_2.png

2. En apportant de l’eau de mer concentrée, puis par une contraction du polype similaire à de l’ultrafiltration, une sélection des molécules Ca²⁺ et HCO3⁻  serait effectuée pour le site. Cette méthode reste une voie paracellulaire passive. Dans un même temps, l’ion Ca²⁺ est amené à sursaturation dans le MCE par voie transcellulaire via à l’utilisation de protéine type canal.

3. Par voie transcellulaire uniquement. Les ions sont absorbés par des protéines de canal sur la face opposée du squelette de la cellule. Ils sont ensuite transférés par le même type de protéines canaux au niveau du site calcifiant. Elle correspond donc à une voie active.

Hypothèse_3.png
Hypothèse_4.png

4. Mélange de voie para et transcellulaire. Ca²⁺ et HCO3⁻ sont apportés entre les cellules mais aussi par absorption et grâce à des protéines canales.

Le transport demeure indéterminé. Néanmoins, différents travaux ont permis de découvrir la présence d’ATPase, qui sont des protéines pompes à Ca²⁺ et Na⁺, des co-transporteurs et des canaux ioniques. De nombreuses mitochondries⁽⁹⁾ sont aussi présentes et permettent le transport des ions et du CO2 métabolique⁽¹⁰⁾ en fournissant l’énergie nécessaire à la calcification, pour les ATPases par exemple. Ainsi, ces premiers indices suggèrent un transport actif et passif, les hypothèses deux et quatre seraient alors favorables.

Le coût énergétique reste partiellement méconnu, néanmoins il est estimé comme assez important. En comparaison avec d’autres organismes, le transport de l'ion Ca²⁺ constituerait une part majeur du coût de la calcification. Par des calculs, la calcification coûterait 13 à 30 % d’énergie totale du corail, tandis que la croissance tissulaire ne représente que 8 % de cette énergie.

M &M

L’apport possible de la symbiose

 

Il est probable que les zooxanthelles puissent favoriser la calcification. Plusieurs théories pouvant coexister sont envisageables. Elles sont capables d’apporter l’énergie et l’oxygène indispensable à sa réalisation, elles pourraient aussi concevoir des composants utilisés dans la synthèse de la MO. Lors de la photosynthèse, avec l’absorption des gaz carboniques, elles pourraient également augmenter le pH dans les tissus et obtenir des conditions plus favorables. Pour finir, avec l’absorption de certaines molécules toxiques comme les phosphates, elles réduiraient une inhibition trop importante de la calcification.

MFOTphU4vZcXrPR9PWPvBqmRiwA_350x251.jpg
Glossaire

Glossaire :

(1) Carbonate de calcium : Le carbonate de calcium (CaCO3) est composé d'ions carbonate (CO3²⁻) et d'ions calcium (Ca²⁺). Le carbonate de calcium est le composé majeur des calcaires comme la craie, mais également du marbre. C'est aussi le constituant principal des coquilles d'animaux marins, du corail et des escargots.

(2) Épithélium : Tissus constitués de cellules étroitement juxtaposées et solidaires entre-elles. Ce tissus peut aussi bien être un revêtement externe, sur la surface de l'épiderme, qu'interne, sur des muqueuses ou organes.

(3) Hemi-desmosome : Type de jonction cellulaire. Il existe entre la cellule et la matrice extracellulaire. Il est présent surtout dans les épithéliums.

(4) Protéine de transport : Protéine qui traverse la membrane cellulaire de part en part et dont le rôle est de permettre aux molécules hydrophiles de traverser ladite membrane.

(5) Calcification : Processus normal ou anormal au cours duquel les tissus de l'organisme se durcissent, du fait d'un dépôt de sels de calcium.

(6) Vésicule cellulaire : Organite relativement petit, séparé du cytosol par au moins une bicouche lipidique. Elle fait partie du cytoplasme, et circule dans le cytosol où elle peut stocker, transporter ou encore digérer des produits et des déchets cellulaires.

(7) Exocytose : processus au cours duquel les substances contenues dans le cytoplasme d'une cellule sont enveloppées par la membrane de cette cellule, pour être ensuite rejetées vers l'extérieur.

(8) Glycosaminoglycane : macromolécules glucidiques formant d'importants composants des matrices extracellulaires des tissus conjonctifs. Polysaccharides de sucre, leur fonction principale est de retenir l'eau dans les tissus et ainsi de les maintenir humidifiés.

(9) Métabolisme : Ensemble des réactions chimiques se produisant au sein des cellules, et par lesquelles certaines substances s'élaborent, ou se dégradent.

(10) Mitochondrie : Organite cellulaire eucaryote, il s'agit d'un élément essentiel dans la production d’énergie nécessaire au fonctionnement de la cellule.

- Haut de la page -

Glossare 2
bottom of page